Sociologie générale sociologie politique
et
Notions du référentiel : Normes, valeurs, rôles, socialisation différentielle,
1. Les processus de socialisation et la construction des identités sociales
Fiche 1 – Comment la socialisation de l’enfant s’effectue-t-elle ?
I.
Qu’est-ce-que la socialisation ? A. Définition
Guy Rocher définit la socialisation comme : « étant le processus par lequel la personne humaine apprend et intériorise tout au cours de sa vie les éléments socio-culturels de son milieu, les intègre à la structure de sa personnalité sous l’influence d’expérience et d’agents sociaux significatifs et par là s’adapte à l’environnement social où elle doit vivre »
B. Quels éléments sont intériorisés lors de la socialisation ? La socialisation est un processus d’acquisition de modèles de comportements, de normes et de valeurs c’est à dire d’éléments composant une culture.
1. Qu’est-ce-que la culture ? La culture est un ensemble d’éléments interdépendants constituant un tout organisé inculqué aux membres de la société et respecté sous peine de sanctions, visant à répondre aux défis auxquels chaque société est confrontée.
2. Les composantes de la culture a. Valeurs et normes
On appelle valeur une manière d’être ou d’agir qu’une personne ou une collectivité reconnaît comme idéale et qui rend estimables les êtres ou les conduites auxquels elle est attribuée.
Il en découle que : o La valeur est un idéal duquel il faut se rapprocher mais qui n’est pas forcément accessible o La valeur appelle l’adhésion des membres de la communauté o La valeur est la finalité et la justification de l’action o La valeur se situe dans un système qualitatif, les différentes valeurs ne sont donc pas indépendantes les unes des autres. Elles tendent à s’inscrire : - dans une hiérarchie qu’on appelle l’échelle des valeurs - elles s’organisent dans un système où chacune prend sens de ses relations avec les autres (la devise française « liberté égalité fraternité »suggère bien cette idée d’interdépendance) - on peut alors parler d’éthos afin de désigner le système de valeurs caractéristique d’une culture - néanmoins la cohérence des valeurs n’est pas totale, la possibilité d’incompatibilité ou de conflits entre les valeurs existe.
les normes sont des règles de conduite très largement suivies dans une société ou un groupe donné, dont la non-observance entraîne des sanctions diffuses ou explicites.
Il en résulte que : o les normes sont des règles sociales ayant un caractère contraignant mais pas forcément légal o les normes sont attachées à des valeurs puisqu’elles ont pour fonction d’inciter les individus à se rapprocher d’un idéal de comportement : par exemple à la valeur respect d’autrui l’interdiction de la violence et du meurtre o Maisonneuve distingue 2 types de normes : - les normes communes à tous les membres de la société ou d’un groupe se référant aux cadres généraux de la vie et au système de représentation, de croyances, de valeurs - les normes de rôle qui dictent les conduites inhérentes à la position d’un individu dans un système social particulier (exemple les normes à suivre comme élèves sont inscrites dans le contrat de vie scolaire)
b. Statut et rôle
Le statut est la position qu’un individu occupe sur une des dimensions de l’espace social comme la profession, le niveau d’instruction, le sexe, l’âge, etc.
Il en résulte que : o le statut définit l’identité sociale de l’individu. o le statut social n’est jamais complètement inné, il reçoit toujours au moins en partie une définition sociale (ex : dans les sociétés traditionnelles les hommes sont plus valorisés que les femmes) o le statut n’est pas définitif, il peut évoluer au cours du temps (ex : statut d’élève, puis d’étudiants, puis d’actifs, puis de retraité) o L’individu peut avoir simultanément plusieurs statuts : par exemple : le père de famille, maire de sa ville, ingénieur
Le rôle correspond à l’ensemble des comportements d’un individu qui sont attendus par les membres de la société, en fonction du statut qu’il occupe.
Il en résulte que : o la société va imposer un système de normes qui lui est spécifique et qui va définir le comportement exigible de la part de l’individu en fonction du statut qu’il occupe o Si l’individu ne respecte pas le comportement exigible il sera sanctionné (exemple : un élève dont l’absentéisme est récurrent) o Un même individu peut avoir plusieurs rôles (qui peuvent être contradictoires) en fonction des différents statuts qu’il occupe : l’individu n’est donc jamais totalement passif ; il dispose d’une liberté d’action lui permettant de s’adapter aux différents groupes auxquels il appartient.
C. Quelles méthodes de socialisation ? 1. Les méthodes traditionnelles de socialisation Le point commun à toutes les méthodes traditionnelles de socialisation est qu’elles considèrent que : l’enfant est un être imparfait qui doit donc être réformé et subir un conditionnement qui lui est imposé (l’enfant est considéré comme passif) afin de pouvoir être intégré à la société
a. La socialisation par l’application de récompenses et de punitions : socialisation par l’injonction Traditionnellement, les parents recourent : à l’application de sanctions ou de punitions quand leur enfant ne se conforme pas aux comportements souhaités. Par contre dès lors que l’enfant respecte les attentes des parents ceux-ci vont le récompenser afin de lui démontrer leur satisfaction.
b. La socialisation par la répétition L’enfant que ses parents entraînent à la propreté, aux bonnes manières subit un apprentissage par la répétition des mêmes gestes qui est destinée à développer en lui des réflexes conditionnés et des habitudes qui se perpétueront tout au long de sa vie.
2. Les orientations contemporaines : une vision moins dirigiste des processus de socialisation. Les points communs à toutes les modes modernes de socialisation est qu’ils : n’ont plus une vision aussi négative de l’enfant (au contraire sa pureté et son innocence sont valorisées) la socialisation ne doit plus être imposée à l’individu qui n’est pas passif il est, au contraire, considéré comme étant un acteur social qui, par les relations qu’il va entretenir avec son environnement, va participer au processus de socialisation
a. La socialisation par l’observation et l’imitation L’enfant apprend en observant les conduites des adultes, en les imitant et en les reproduisant. Mais l’enfant ne reproduit pas systématiquement le comportement observé : on ne peut postuler que l’enfant va imiter tous les modèles qui lui sont présentés Car l’enfant ne fait pas qu’assimiler bêtement ce qu’il reçoit de son environnement, il réfléchit, il intègre, il donne un sens à ce qu’il perçoit de la vie adulte. L’enfant a d’autant plus de chances de s’identifier à l’adulte et à reproduire les comportements souhaités qu’il s’est établi une relation affective avec la personne de référence (le père, la mère, l’éducateur, etc), que le socialisé admire. Dans le cas contraire le risque de rejet est important. On voit donc que les conceptions traditionnelles, qui préconisaient l’imposition de modèles par des adultes devant garder leurs distances et imposer leur autorité, ne sont pas sans accroître le risque d’échec de la socialisation par l’imitation.
b. La socialisation par l’expérimentation et par l’interaction L’enfant qui est confronté à une nouvelle situation (par exemple un jeu) va : opérer une série d’essais qui vont lui permettre de tester son comportement et en fonction des erreurs (ou réussites) qu’il aura réalisées , il comprendra par la réaction choquée (ou au contraire encourageante de son entourage) qu’il doit il se corriger et ainsi il progressera. La socialisation par essai et erreurs est d’autant plus valorisée aujourd’hui qu’elle donne un rôle actif à l’individu qui n’assimile plus bêtement des règles dont il ne comprend pas forcément l’utilité Mais surtout parce qu’elle se construit dans l’interaction, c’est-à-dire par les échanges qui s’opèrent entre le socialisé (l’enfant) et les agents socialisateurs (les parents par exemple)
Conclusion L’individu est ainsi adapté à son environnement social et peut communiquer avec les autres membres de la société dont il partage les idées, les goûts et les aspirations, ce qui lui permet de s’identifier au « nous » collectif. La socialisation intègre la culture et la structure sociale de la société à la personnalité psychique de l’individu : de telle façon que les règles, les obligations définies par la société paraissent naturelles et influencent les manières de penser, d’agir et de sentir. C’est grâce à cette intégration des éléments socio-culturels que le poids du contrôle social n’est en définitif que peu ressenti consciemment. L’individu n’a pas le sentiment d’obéir à la pression d’une autorité extérieure, c’est de sa propre conscience que jaillit la source de sa conformité. Attention : Dans les sociétés modernes l’enfant n’est plus formaté par son entourage, d’azutant plus que les différents agents peuvent lui envoyer des messages contradictoires
II.
Des modèles de socialisation parfois contradictoires A. Différents agents de socialisation
Traditionnellement on distingue : les agents de socialisation dont l’action est directe et dont c’est une des fonctions explicites : la famille, l’école, la religion . des milieux de socialisation dont l’influence est indirecte et qui contribue à la formation de l’individu sans qu’une volonté explicite de socialisation soit mise en œuvre : le groupe des pairs, les média, les clubs et associations. Les premiers visent une socialisation de la totalité de la personne. Les seconds s’intéressent essentiellement à une partie de la personne : celle qui est en rapport avec le groupe en question.
B. Avec des processus de socialisation différents Les messages, valeurs et normes véhiculés par les différentes instances de socialisation aux enfants ne sont pas toujours identiques : Les instances de socialisation peuvent être complémentaires (l’école et la famille souhaitent et encouragent la réussite scolaire des enfants) mais elles peuvent aussi parfois différer voire être contradictoires (les professeurs et les camarades de classes peuvent porter des normes et des valeurs contradictoires). Les méthodes de socialisation peuvent aussi varier : certaines familles valorisant les méthodes traditionnelles (injonction et sanction) alors que l’école valorise davantage les modèles de socialisation par essais et erreurs Cela n’est pas sans poser de problèmes à l’enfant pour déterminer la conduite à tenir, le rôle à adopter. En effet, lorsqu’un individu se trouve exposé à des règles contradictoires par les différentes instances de socialisation, son identité est remise en question. Il en résulte donc parfois des conflits de socialisation, mais aussi la possibilité de choisir certaines normes et valeurs, d’adapter son comportement aux différentes situations auxquelles il peut être confronté.
III.
Une socialisation différentielle A. Définition
C’est le processus de socialisation qui conduit à ce que différentes catégories d’individus acquièrent des normes, des valeurs et des comportements différents en fonction de leur appartenance sociale ou de leur genre
B. Une socialisation différente selon le sexe Les individus reçoivent des socialisations différentes selon leur sexe. C'est l'un des aspects les plus puissants de la socialisation que de transformer une différence biologique (le sexe) en une différence sociale (le genre) : « On ne naît pas femme, on le devient », écrivait Simone de Beauvoir. Apparemment dictées par une différence génétique, les identités masculines et féminines sont en réalité des constructions sociales, produites par la socialisation primaire, et confortées par la socialisation secondaire, à l'école, dans le couple, et au travail Exemple développé par M Darmon : Une socialisation corporelle différente pour les filles et les garçons « l'essentiel de l'apprentissage de la masculinité et de la féminité tend à inscrire la différence entre les sexes dans les corps (à travers le vêtement notamment) sous la forme de manières de marcher, de parler, de se tenir, de porter le regard, de s'asseoir, etc. » (P Bourdieu). Qu'on pense en effet à tout le travail qui est accompli pour inscrire très précocement la différence sexuelle sur les corps enfantins : le bleu et le rose, les pantalons et les jupes, parfois même les boucles d'oreilles... C'est donc dès l'enfance que la différenciation des vêtements inculque un rapport au corps particulier : on ne marche pas, on ne se tient pas, on ne s'assoit pas de la même manière en pantalon et en jupe, on n'est par ailleurs pas autorisé socialement à avoir les mêmes attitudes et activités, et on prend de ce fait insensiblement l'habitude d'un rapport à l'espace (et donc au monde social) différent. Cet apprentissage insensible façonne donc chaque corps (et partant chaque individu) selon les structures du milieu où il grandit. Muriel Darmon, La socialisation, Armand colin, Coll. 128, 2008.
C. Et le milieu social Les sociétés modernes sont des sociétés complexes qui du fait de leur hétérogénéité imposent aux individus des modèles de comportement plus souples et moins contraignants que ceux des sociétés primitives. Il va donc y avoir une diversité de cultures dans une société en fonction de la diversité des milieux sociaux, de. Une société n'est pas un ensemble homogène : elle est constituée de groupes sociaux distincts et hiérarchisés, dotés d'une sous-culture propre, transmise lors de la socialisation primaire. Une sous-culture est le système de valeurs, normes et modèles de comportements, propre à un groupe social (les jeunes, les ouvriers, les occitans, etc.) lui permettant de se différencier et d’intégrer ses membres en développant une conscience collective sans pour autant s’opposer à la culture de la société.
Comme la socialisation commence dès la plus tendre enfance, chacun est socialisé par ses parents qui ont eux-mêmes une place dans la stratification sociale. Chacun est donc socialisé dans une société d’abord en fonction de la profession de ses parents, donc plus généralement en fonction de la classe sociale dans laquelle il naît. Les individus reçoivent des socialisations différentes selon leurs milieux sociaux d'appartenance.
Un schéma de synthèse : Source : JF Freu
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