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LA COMMUNICATION NONVERBALE Motto : « Le fait est que « de simple mots » ça n’existe pas. Il n’y a que des mots doublés de gestes ou d’interactions ou d’autres choses de ce genre». G. Bateson (1977, 31)
INTRODUCTION La communication est souvent fondée sur l’intention d’émettre un message en vue de modifier l’opinion, la décision, les sentiments, les émotions ou le comportement d’un récepteur. En règle générale, au moment où il produit un signal, l’émetteur conscient de ses moyens agit pour y parvenir par référence à la finalité qu’il s’est fixé. Or, bien des fois, nous émettons des messages et nous modifions le comportement de nos proches à notre insu. Car, le système verbal de communication s’accompagne d’un système nonverbal, parfois même plus „parlant” que le premier. Ainsi, avant même d’ouvrir la bouche pour parler, les gens fournissent une abondance d’informations par l’intermédiaire de leurs comportements. Quels seraient, par exemple, les messages transmis par quelqu’un qui se présente à un entretien d’embauche? Depuis la manière dont il / elle est habillé(e), coiffé(e), chaussé(e) et jusqu’à sa manière de s’asseoir sur une chaise, son regard, sa voix, tout parle à ceux qui observent la personne. Ses postures, ses gestes, ses expressions faciales sont également de bons indicateurs qui apportent pas mal d’information. La personne se tient-elle droite? A-t-elle une poignée de main ferme? Sourit-elle? Vous regarde-t-elle dans les yeux lorsque vous lui serrez la main? (Certes, l’impression que dégage le comportement d’une personne forme un ensemble et il serait assez difficile de séparer chaque forme de communication nonverbale, surtout dans la vie courante*). L’étude de la communication nonverbale proprement dite est de date relativement récente, car pendant longtemps on a cru que s’il n’y avait pas de mots, il n’y avait pas de communication. Les temps modernes connaissent une vraie mode du nonverbal et de nombreux savants venus d’horizons très divers – biologistes, psychologues, psychiatres, anthropologues, sociologues, linguistes, sémioticiens et autres *
Les spécialistes de l’embauche sont, par exemple, formés pour observer le moindre comportement nonverbal. Parfois, ils se constituent même en équipes afin que rien ne leur échappe. LA COMMUNICATION NONVERBALE
politologues - s’adonnent à des recherches théoriques et surtout expérimentales. Parmi les pionniers, citons dans la foulée Ch.Darwin et W.Wund ( le créateur de la psychologie expérimentale) au siècle passé, ainsi que, plus récemment, K.Lorenz et S.Freud. Ce dernier affirme: „celui qui a des yeux pour voir et des oreilles pour entendre constate que les mortels ne peuvent cacher aucun secret.” ORIGINES DU NONVERBAL Pour Charles Darwin le comportement nonverbal est inné chez l’homme, tout comme les émotions fondamentales, alors que les chercheurs modernes parlent plutôt de conventions culturelles. Pourtant, en dépit des marques culturelles, on peut parler d’un langage universel, car tous les hommes sourient, pleurent ou tremblent d’émotion. (Plessner H., 1982) R.Paget (1930, cité par T.Slama-Cazacu, 1959, 30) considère que le système gestuel de communication s’est élaboré avant l’apparition du langage articulé. Plusieurs arguments sont invoqués par ce chercheur: les ensembles gestuels par lesquels communiquent encore de nos jours diverses tribues ainsi que les sourds-muets et même les primates; le caractère universel de certains gestes chez les Blancs aussi bine que chez les Noirs; les réactions imitatives motrices et les mimiques affectives imitatrices du bébé (exemple: lorsqu’on lui sourit, le bébé vous sourit). En 1963, Otto Klineberg attaque cette théorie avec force contre arguments: • le langage des signes des Indiens d’Amérique n’a pu être décodé, du premier abord, par les Européens de Christophore Colomb; • la possibilité d’une communication exclusivement motrice et gestuelle a été dépassée, même par les singes anthropoïdes. Car, on a pu constater que les vocalisations différenciées émises par ces animaux représentent les signaux d’une variété d’états affectifs que ces animaux se communiquent. En même temps, le comportement motrice, les divers cris non-articulés et un certain langage gestuel sont tous antérieurs à l’apparition de l’homme. Ce qui est propre à l’homme c’est que les gestes ont un sens et servent la communication uniquement grâce à la naissance du langage articulé.(cf. A. LeroiGourhan, 1964) Comme nous l’explique A.N.Leontiev (1964), la communication gestuelle s’est formée chez l’homme en même temps que le détachement de ses mouvements de l’action sur les objets et que sa nominalisation (le geste doit être nommé pour avoir un sens). Lors de leur évolution, les gestes requièrent des significations sociales et culturelles, se standardisent et servent à la communication aussi bien que le langage verbal (M.Von Cranach, 1973).
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
LES MESSAGES NONVERBAUX Bien que nous étudiions pour des raisons d’ordre pédagogique les formes de la communication nonverbale une à une, elles sont toutes reliées entre elles dans le fait. En même temps, leur étude relève de la transdisciplinarité et s’effectue au cadre d’équipes de chercheurs venus d’horizons très divers : anthropologues, sociologues, linguistes, psychologues et médecin psychiatres. Ainsi l’anthropologue Ray Birdwhistell (1968), influencé par la linguistique descriptive et structurale, crée-t-il la kinésique ou l’étude des mouvements corporels. Ce chercheur argue que la signification d’un geste n’existe pas, car le geste s’intègre dans un système interactionnel à multiples canaux qui se confirment ou s’infirment mutuellement. Pour lui, gestualité et langage s’intègrent dans un système constitué d’une multitude de modes de communication, tels que le toucher, l’odorat, l’espace et le temps. Si une place si importante est accordée au langage dans les recherches sur la communication face à face, c’est sans doute parce que le langage est un mode de communication essentiel, mais aussi parce que les travaux sur les autres modes sont encore très peu développés. Pour Birdwhistell, il n’est donc pas possible de déterminer une hiérarchie des modes de communication selon leur importance dans le processus interactionnel. Si le mode verbal porte le plus souvent l’information intentionnelle explicite, d’autres modes assurent des fonctions tout aussi nécessaires au bon déroulement de l’interaction. Ainsi l’étude isolée du langage ou de la gestualité n’intéresse plus ce chercheur qui s’adonne, par exemple, à des travaux concernant les marqueurs kinésiques qui accompagnent les pronoms et les adverbes ainsi que les kinèmes d’accentuation et de jonction qui ponctuent, découpent et relient les éléments du flot verbal au cadre d’une étude qu’il nomme lui-même « linguistico-kinésique »
Quelques marqueurs kinésiques de la syntaxe américaine selon R. Birdwhistell ( in Y. Winkin, 1984, 73)
LA COMMUNICATION NONVERBALE
LES « CATEGORIES MAJEURES DE L’ACTION » Les taxinomies concernant les comportements communicatifs que nous avons consultées (A.E. Scheflen (1965/1984, 147), S. Duncan Jr. et D. Fiske (1977,6), R. Ghiglione (1986,144)) sont élaborées à partir de nombreuses études pour la plupart transdisciplinaires, entreprises surtout dans la deuxième moitié du XXe siècle. Les comportements qui contribuent à l’interaction verbale face à face sont nommés par Duncan et Fiske « major categories of action ». Or, parmi ces catégories, il n’est pas sans intérêt de mentionner le fait que ce n’est qu’en dernier lieu que ces auteurs citent le langage verbal « tel qu’il est traditionnellement défini ». Selon A.E. Scheflen (dont nous avons pris la plupart des comportements compris dans le « TABLEAU DES COMPORTEMENTS COMMUNICATIFS ») il est restrictif de parler de comportement verbal et nonverbal, car bien des composantes de la communication face à face transgressent ce cadre. Le tableau ci-après représente une énumération, chaque comportement étant illustré – sans prétentions exhaustives – par des chercheurs représentatifs pour chaque domaine. Ajoutons le fait que l’interaction incessante entre verbal et nonverbal a conduit T. Slama-Cazacu à la création du concept de « syntaxe mixte » (1976, 1977,1979,1999), tant il est vrai que ces deux principaux canaux de la communication humaine sont inextricablement imbriqués. L’émission ainsi que la réception dans la communication face-à-face ne saurait ignorer l’implication d’au moins trois des canaux perceptifs : auditif, visuel et kinésique (T. Slama-Cazacu, 1999, 184-196).
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
TABLEAU DES COMPORTEMENTS COMMUNICATIFS I. Le comportement vocal (a) linguistique ; (b) paralinguistique Le paralangage est défini comme la totalité des éléments de la prononciation qui ne sont pas inclus dans la description phonologique d’une langue (G.L. Trager, 1958, M.Argyle, 1969, 1993); II. Le comportement kinésique (a) les mouvements corporels (les gestes) ainsi que l’expression faciale (le regard, la mimique), sont appelés par A. Kendon (1967) „ le comportement visible ” (R.L.Birdwhistell, 1952, 1967,1970,1986) (b) les éléments « neuro-végétatifs » :coloration de la peau, dilatation de la pupille, activité viscerale etc. (A.E. Scheflen, 1965). (c) la posture (A.E. Scheflen, 1964 (d) les bruits corporels (A.E. Scheflen, 1965). III. Le comportement tactile (« Heptics ») Le contact corporel entre les hommes dans l’interaction verbale et nonverbale (Austin, 1967) IV. Le comportement territorial La « proxémique » ainsi que les autres comportements sont fortement marqués par la culture des interactants (E.T. Hall, 1959,1968, 1976,1994) V. L’utilisation de l’odorat (« social olfaction ») Est un comportement encore peu étudiée. VI. L’utilisation des artefacts Est défini par le choix des vêtements, couleurs, bijoux, articles de décoration des espaces etc. (R.Mead, 1990)
LA COMMUNICATION NONVERBALE
RAPPORTS ENTRE VERBAL ET NONVERBAL M. Ritchie Key (1975) ainsi que d’autres chercheurs trouvent qu’il y a des formes d’interaction significatives entre messages verbaux et nonverbaux: „The nonverbal act can repeat, augment, illustrate, accent or contradict the words” (M. Ritchie Key, 1975, 35). Nous les passeront en revue et donnerons quelques exemples dont certains sont tirés de J.de Vito (1993, 110): 1. L’accentuation On utilise des signaux nonverbaux afin de souligner ou de mettre en évidence une portion quelconque de son message verbal. Ainsi, un sourire peut-il éclairer le sens que nous voulons donner à un mot ou à une phrase. Frapper du poing peut souligner une conclusion etc. 2. Le renforcement Tout message se trouve renforcé lorsque le nonverbal est en harmonie avec le verbal. Par exemple, en affirmant: „Je n’aime pas Marie: son attitude est duplicitaire” et en fronçant en même temps mes sourcils, je renforce mon message et ma communication devient plus cohérente. 3. La répétition Répéter ou réitérer le message verbal est une autre manière d’interagir par des signaux nonverbaux. Lorsque vous dites sur un ton impératif „Sortez tout de suite!” et que ensuite vous indiquez la porte avec votre bras tendu et votre doigt (mais vous pouvez le faire aussi en même temps) vous dites la même chose, mais de deux manière différentes. Là encore vos gestes sont cohérents avec vos paroles. 4. La contradiction Parfois la contradiction est intentionnelle. Vous clignez de l’œil d’une façon complice pour indiquer que vous ne dites pas la vérité ou encore, vous racontez une histoire amusante avec une mine triste pour provoquer l’hilarité (Cette contradiction est d’ailleurs l’une des sources de l’humour). On observe également de nombreux messages nonverbaux relevant d’une contradiction non-intentionnelle. Sans s’en rendre compte, le locuteur émet des messages nonverbaux qui vont à l’encontre de son message verbal. Ainsi, lorsque l’on affirme compatir à la douleur d’une personne sur un ton égal, sans modulation de la voix et avec une expression faciale impassible. 5.La substitution Selon K.Danzinger (1976, 66) il y a des gestes qui servent la parole („motorprimacy”) et d’autres qui remplacent la parole („speech-primacy”). Dans la vie quotidienne on hoche souvent la tête pour dire „oui” ou on la secoue en signe de négation (mais gare aux différences entre les cultures!). Les gestes remplacent aussi les paroles lorsqu’on se trouve à grande distance ou dans un lieu de travail très bruyant (voir T.Slama-Cazacu, 1954). LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
6. La régularisation Par les indications non-verbales qui se constituent en vrais „rites conversationnels” pour utiliser l’expression de E.Goffman on peut régulariser le débit des messages verbaux, leur étendue, signaler qu’on n’a pas fini de parler, demander ou donner la parole etc. MISES EN GARDE Depuis plusieurs années, l’étude de la communication nonverbale a suscité l’intérêt de larges catégories de personnes intéressées à comprendre, à influencer, voire à manipuler autrui ou simplement à faire „bonne impression” (dans les entretiens d’embauche, notamment). Certaines précautions sont cependant à signaler afin de ne pas nous illusionner sur l’excellence sans failles de nos „décodages”. (Selon E. Hall (1979,81) les ouvrages de vulgarisation représentent un vrai danger de ce point de vue) Tout d’abord, il faut nous rendre compte du pouvoir relatif des comportements nonverbaux dont l’interprétation ne doit pas être détachée de son ensemble contextuel et communicatif. Ceci consiste surtout à relier chaque comportement nonverbal: • • • •
aux autres messages verbaux ou nonverbaux qui l’accompagnent; à la relation interpersonnelles entre les interlocuteurs ; à la culture à laquelle appartient l’interlocuteur ; à d’autres éléments contextuels.
Si mon patron me fixe d’un drôle d’air, est-ce parce que je suis mal coiffé(e), est-ce parce que j’ai refusé la semaine dernière de lui rendre un service ou parce qu’il réfléchit s’il doit ou non m’accorder une prime? Avant de tirer des conclusions, il vaut mieux observer d’autres signes de son comportement, réfléchir à la qualité de notre relation et aussi, tout simplement écouter ce qu’il dit. Ensuite il arrive, comme nous l’avons montré, que certains de nos comportements transgressent des typologies trop rigides. Par exemple, croiser les jambes est habituellement interprété comme un geste d’autoprotection. Mais comme il ne faut pas dissocier les différentes parties du corps, l’air décidé et les mains libres d’une personne peuvent prouver sa confiance en elle-même. Enfin, s’il est vrai que des types généraux de messages nonverbaux signifient toujours les mêmes choses dans un environnement donné, il y a des utilisations spéciales et même uniques d’une personne à l’autre et surtout d’une culture à l’autre.
LA COMMUNICATION NONVERBALE
LE COMPORTEMENT TEMPOREL Le « langage » temporel - qui est lui aussi culturellement déterminé - ne se trouve pas au « tableau des comportements communicatifs » bien que ce comportement soit « fondamental » en communication de l’avis de E. Hall (1984,1994). Aussi pour agir efficacement dans un milieu étranger, est-il indispensable d’apprendre le langage temporel qui y prévaut. Selon E. Hall (1984) deux systèmes temporels opposés régissent les cultures: Le temps monochronique et le temps polychronique. LE TEMPS MONOCHRONIQUE : « TEMPS M » Dans les cultures monochroniques, le temps est perçu et utilisé d’une manière très linéaire. Il est une route conduisant du passé au futur. C’est un temps que l’on peut décomposer en segments de plus en plus fins. Chaque segment reçoit une affection précise, il est réservé à un projet parfaitement déterminé. C’est lui qui permet de ne faire qu’une seule chose à la fois. On parle de lui comme de l’argent : on peut le dépenser, le perdre, le gaspiller, on peut aussi bien l’économiser. Il tend à isoler, à diminuer le nombre des interactions possibles. Le mode de vie des Allemands est une parfaite illustration du temps monochronique. LE TEMPS POLICHRONIQUE : « TEMPS P » Il est l’antithèse du temps monochronique. Il est caractérisé par les simultanéités de différentes activités et par un intérêt plus vif pour les individus qui priment sur tout programme pré-établi. C’est un temps très latin. Le « Temps P » est moins « tangible » que le « Temps M ». Il correspond davantage à un nuage de points qu’à la droite évoquant le « Temps P ».
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
LES SYSTEMES TEMPS ELEMENTS CARACTERISQUES* SYSTEME POLYCHRONIQUE (P) On mène plusieurs tâches de front.
SYSTEME MONOCHRONIQUE (M) On ne fait qu’une chose à la fois.
On admet les interruptions et les changements d’occupation.
On se consacre totalement et exclusivement à la tâche entreprise.
Programmes et projets sont fréquemment et facilement modifiés.
On suit scrupuleusement les programmes établis.
L’exactitude est très relative.
L’exactitude est poussée à l’extrême.
La gestion à court terme est supérieure à la gestion à long terme.
La gestion à long terme est supérieure à la gestion à court terme.
Les engagements considérés comme les plus contraignants concernent les personnes.
Les engagements considérés comme les plus contraignants concernent le temps, les dates, les délais…
Les individus manquent de patience et tendent à passer directement à l’action.
Les individus sont plus lents, plus méthodiques et moins impliqués effectivement.
Les échanges, les prêts et les emprunts d’objets familiers sont bien admis.
Chaque chose doit être à sa place, tout est cloisonné. Organisation fonctionnelle et rigide.
Il existe une charge affective dans les Le programme prime sur les relations affaires. On peut sacrifier du temps prévu personnelles. pour le travail afin de nouer des relations. LES CULTURES (∗) POLICHRONIQUES INTERMEDIAIRES - Cultures du Bassin - Cultures françaises Méditerranéen monochroniques par - Cultures asiatiques la pensée et - Cultures africaines polycroniques dans le - Cultures latino-américaines comportement. ∗
MONOCHRONIQUES - Cultures germaniques - Cultures nordiques - Cultures anglo-saxonnes
Ce classement n’est pas fait pour enfermer chaque individu d’un pays dans des comportements invariants mais plutôt pour donner une tendance générale.
LA COMMUNICATION NONVERBALE
COMMUNICATION NONVERBALE ET ENSEIGNEMENT DES LANGUES ETRANGERES Lors d’une étude de terrain R. Birdwhistell s’aperçoit que la gestualité des Indiens bilingues change lorsqu’ils passent de leur langue à l’anglais. Il interprète ce changement comme une imitation de l’homme blanc. Mais il sent que ce n’est pas là la réponse définitive. De retour à l’Université il a l’occasion d’étudier un film sur l’homme politique new-yorkais Fiorella La Guardia qui parle couramment italien, yiddish et anglo-américain. Birdwhistell montre le film après avoir coupé le son à plusieurs personnes connaissant ces trois cultures. Toutes peuvent déterminer quelle langage La Guardia utilise à chaque moment. Comme chez les Indiens, il y a autre chose qu’une performance d’acteur. Car en changeant de langue, l’homme change également de langage corporel. (cf. Y. Winkin, 1984,66,67). Cette constatations aura – mais de nos jours seulement – un impact considérable sur l’enseignement des langues étrangères. Car, si les professeurs de langues du temps de la méthode directe usaient de maints gestes, attitudes et mimiques pour faire décoder à leurs élèves des mots qu’ils n’étaient pas permis de traduire dans leur langue maternelle (On aura constaté plus tard que l’élève traduit mentalement de toute façon!), ces gestes, attitudes et mimiques étaient pour la plupart utilisés - afin d’être décodés – dans le code nonverbal de l’élève. Ainsi verbal et nonverbal étaient artificiellement dissociés dans l’apprentissage d’une langue-cible. La méthode AVSG (audio-visuelle structuro-globale) fit naître le film didactique dans lequel les acteurs, des natifs, usent d’indices nonverbaux qui leur sont propres pour renforcer ou illustrer leurs dires. Ceci permet à l’élève de comprendre à la fois le geste et la parole ou bien de ...brouiller les cartes selon leurs perceptions sociales „nationales”, car là aussi la traduction est interdite au professeur. Quand aux manuels dialogués de l’époque, ce sont de véritables bandes dessinées dont les images doublent (répètent) et même expliquent, en illustrant tant bien que mal par des mimiques, des attitudes, des gestes concordants les paroles des protagonistes (ANNEXE 1). Cependant, ces manuels ont rarement quelque chose de caractéristique à la gestualité du code étranger. De nos jours, soucieux d’inculquer à leurs apprenants une compétence de communication réelle en anglais–langue étrangère, les auteurs américains vont jusqu’à élaborer des manuels accompagnés de vidéocassettes, spécialement conçus pour l’acquisition d’un comportement nonverbal adéquat aux situations de communication spécifiques à la culture de la langue enseignée. En même temps, les exercices sont centrés sur l’apprentissage de la communication verbale et nonverbale à la fois. (ANNEXE 2)
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
ANNEXE 1
Alors, nous sautons sur nos vélos et
nous pédalons
- Laissez-moi passer le premier! crie Jacques.
- Attention! Tu vas tomber! le prévient Luc.
Et en effet*, Jacques dérape et
*en effet – într-adevăr
LA COMMUNICATION NONVERBALE
tombe
Pauvre Jacques! Il pleure et pourtant seulement sa culotte est déchirée
- Un peu de courage! Conduis-toi comme un grand*, lui dit Juliette. *comme un grand – ca un băiat mare
- Arrêtons-nous ici et
commençons à manger nos sandwiches, décide Madame Morel.
Source: M. Gulea, H.P. Blottier (1976); Curs intensiv de limba franceză, Bucureşti, Editura Ştinnţifică
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
ANNEXE 2
1 Handshakes What kinds of handshake did you receive in The role-play on page 19? What kind of handshake did you give? 2 First impressions People who work with their hands (artists, musicians, surgeons etc.) often give a limp Handshake. What can you tell about people From their handshakes? She has a firm handshake I think she’s a confident person Use the words opposite.
LA COMMUNICATION NONVERBALE
ATELIER Exercice
1. Trouvez vous-mêmes – à partir des « marqueurs kinésiques de la syntaxe américaine » - des exemples linguistico-kinésiques chez les locuteurs roumains.
Exercice
2. Illustrez la « syntaxe mixte » chez les Roumains ou chez des locuteurs étrangers par des exemples.
Exercice
3. A partir du tableau des « comportements communicatifs », rappelez-vous certaines situations sociales au cadre desquelles vous avez pu déceler des messages à partir uniquement de comportements nonverbaux.
Exercice
4. Vous est-il arrivé de vous tromper quand au sens d’un « comportement nonverbal » ? Décrivez la situation.
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
Exercice
5: RENFORCER LE MESSAGE
Le geste (a) exprime un.... Le geste (b).... Le geste (c
t (a)
(b)
(c)
Source: Gilber D, Rozé Y.,(1992) Verbal et nonverbal – les outils de l’influence, Paris, Images pour la formation
EXERCICE 6: CONTREDIRE LE MESSAGE LA COMMUNICATION NONVERBALE
Que dit chaque geste? Le geste (a) dit:....
(a)
(b)
(c)
Source : Gilbert D., Rozé Y., op. cit.
EX E RCI CE 7 .
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
1
Les gestes ci-contre renforcent les messages verbaux. Trouvez les mots qui peuvent accompagner ces gestes pour chaque cas. Plusieurs variantes sont possibles.
2 1. a b c 2. a b c
3
3. a b c
EX E RCI CE 8 .
Commentez le rapport texte-image dans les dix répliques du dialogue de l’annexe 1 (tiré de Gulea, M., H.P.Blottier, 1976: Limba franceză – curs intensiv, Bucureşti, Editura Ştiinţifică şi enciclopedică);
EX E RCI CE 9 .
Commentez l’efficacité des deux exercices proposés dans l’annexe 2.
EX E RCI CE 1 0 .
Comparez les deux démarches didactiques proposées dans l’annexe 1 et respectivement 2.
LA COMMUNICATION NONVERBALE
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1 Argyle M. (1969) : Social interaction, Chicago, London, Aldine Publishere Co., Methnen 2 *** (1993) : The syntaxes of bodily communication, « International Journal of Psycholinguistics », 2, pp. 71-92. 3 Bateson G. (1972) : Vers une écologie de l’esprit, t.I, Paris, Seuil. (traduction française, 1977) 4 Birwhistell R.L. (1952) : Introduction to Kinesics (An Annotation System for Analysis of Body Motion and Gesture), Louisville, Univ. of Louisville Press. apud Y. Winkin, (1981), op.cit., Bibliographie. 5*** (1967) : La communication nonverbale in Alexandre Paul, (dir. publ)., L’aventure humaine. Encyclopédie des sciences de l’homme, Genève, Ed. Kister, Paris, Ed. de la Grange Batelière, vol. 5, pp. 157-166 6 *** (1968) : L’analyse kinésique, « Langages », 10, pp. 105-106. 7 *** (1970) : Quelques réflexions sur la communication, « Cahiers de psychologie sociale », 29, janvier 1986, pp 3-6 (traduit de l’américain). 8 *** (1970) : Un exercice de kinésique et de linguistique : la scène de la cigarette in La nouvelle communication (Textes recueillis et présentés par Ives Winkin, Seuil, 1984) 9 Croussy G. (1989) : La génération de la communication, Lille, J.P.Kupczyk éd., pp. 44-49 10 Danziger K. (1976) :Interpersonal communication, New York, Pergamon. 11 Darwin C. (1872/1965) : The expression of emotions in man and animals, University of Chicago Press. 12 Dinu M. (1997) Comunicarea, Bucureşti, Editura Ştiinţifică, cap.16. 13 Duncan S. JR., Fiske D. (1997) : Face to face interaction, Hilsdale (N.J.) , Erlbaum 14 Freud S. (1891/1983) : Contribution à la conception des aphasies, Paris, P.U.F. 15 Gliglione R. (1986) : L’homme communiquant, Paris, Seuil
LES FONDEMENTS DE LA COMMUNICATION FACE A FACE
16 Gilbert D., Y. Rozé (1992) : Verbal et nonverbal – les outils de l’influence, Paris, Images pour la formation 17 Goffman E. (1974) : Les rites d’interaction, Paris, Ed. de Minuit et 18 Gulea M., H.P. Blottier (1976) : Curs intensiv de limba franceză, Bucureşti, Editura Ştiinţifică şi enciclopedică. 19 Hall E. T. (1959) : Le langage silencieux, Paris, Seuil, (traduction française, 1984). 20 *** (1966) : La dimension cachée, Paris, Seuil (traduction française, 1971). 21 *** (1976) : Au delà de la culture, Paris, Seuil (traduction française, 1979) 22 *** (1984) : La danse de la vie, Paris, Seuil 23 Hall E. T., HALL M. R. (1994) : Comprendre les Japonais, Paris, Seuil 24 Kendon A. (1967) : Some Functions of Gaze Direction in Social Interaction, « Acta psihologica 26 », pp. 1-47, apud Y. Winkin (1984) 25 Kerbrat-Orecchioni C. (1994) : Les interactions verbales. Variations culturelles et universaux, vol III, pp. 16-34 26 Klineberg O. (1963) : Le langage, Paris, Flammarion 27 Leontiev N. (1964) : Probleme ale dezvoltării psihicului, Bucureşti, Editura Ştiinţifică 28 Lorenz K. (1978) : Les fondements de l’éthologie, Flammarion, (traduction française,) pp. 11-23, 403-404 29 Mead R. (1990): Cross-cultural management 30 Pacout N. (1991) : Le langage des gestes, Marabout. 31 Paget R. (1930) : Human speech, London Kegan, Trench, Trubner apud T.SlamaCazacu (1999) Psiholingvistica, o ştiinţă a comunicării, Bucureşti, ALL, 32 Plessner H. (1982) : Le rire et le pleure. Une étude limite du comportement humain. Paris, Maison des Sciences de l’Homme (traduction française, 1985). 33 Ritchie Key M. (1975) : Paralanguage and Kinesics (Nonverbal communication), Methuen, New York, The Scarecrow Press. Inc.
LA COMMUNICATION NONVERBALE
34 Scheften A.E. (1964) : The Significance of Posture in communicational Systems , « Psychiatry », 27, pp. 316-331. 35 *** (1965) : Systèmes de la communication humaine in Y. Winkin (1981), op. cit., pp. 145-190. 36 Slama-Cazacu T. (1959) : Limbaj şi context, Editura ştiinţifică. 37 *** (1964) : Comunicarea în procesul muncii, Bucureşti, Editura Ştiinţifică 38 *** (1976): Non verbal components in messages sequence. The “mixed syntax” in Language and man. Anthropological issues, Eds. W. Mc Carmack, S. Wurm, The Hague-Paris, Mouton. 39 *** (1979) : Sémiotique et psycholinguistique. Recherches sur la « syntaxe mixe » in Panorama sémiotique (Actes du Ier Congrès Int. de Sémiotique Milano), The Hague, Monton, pp. 560-564. 40 *** (1999) : Psiholingvistica, o ştiinţă a comunicării, Bucureşti, Bucureşti, ALL. 41 Trager G. (1958) : Paralanguage : A First Aproximation, « Studies in Linguistics », 13, pp. 1-12.apud Y. Winkin (1984) op. cit. 42 Von Cranach M. (1973) : La communication nonverbale dans le contexte du comportement de communication in S. Moscovici (éd.) Introduction à la psychologie sociale, 2, Paris, Librairie Larousse, p. 135-168. 43 Winkin Y. (1984) : La nouvelle communication, Paris, Seuil. 44 WundT W. (sans année) Eléments de psychologie physiologique, Paris, Alcan, (traduction française) apud T. Slama-cazacu, 1999 op cit.
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